Salaire minimum : pourquoi en (re)parle-t-on aujourd’hui ?
Parce que la semaine dernière, les oppositions de centre-gauche (à l’exception d’Italia viva) ont présenté un projet de loi pour son introduction en Italie. La proposition, articulée en sept points, prévoit un seuil minimum de 9 euros bruts par heure, dans le but de protéger les travailleurs « pauvres » qui sont actuellement moins bien payés et qui, dans de nombreux cas, ne sont pas couverts par des conventions collectives.
Dans quels pays d’Europe existe-t-il un salaire minimum ?
L’Italie fait partie des quelques pays qui ne prévoient pas de limite de salaire minimum, rejointe par cinq autres pays de l’UE : le Danemark, l’Autriche, la Finlande, la Suède et Chypre. Dans six pays, le plafond est plus élevé qu’en Italie : le Luxembourg, l’Allemagne, la France, la Belgique, les Pays-Bas et l’Irlande, qui se situent dans une fourchette comprise entre 13 et 11 euros.
Quels sont les travailleurs concernés et combien sont-ils ?
Selon les données de l’Inps, environ 4,6 millions de travailleurs n’atteignent pas les 9 euros bruts prévus par le pdl. La catégorie où les salaires sont les plus bas est celle des travailleurs domestiques et de l’agriculture, où 35 % des travailleurs sont en dessous du seuil minimum.
Qui soutient le salaire minimum ?
Le front politique qui soutient le salaire minimum est hétérogène et rassemble toutes les oppositions, à l’exception d’Italia Viva : du PD au M5S, d’Azione à Avs et +Europa. Pour la secrétaire du PD, Elly Schlein, il s’agit d’une proposition forte et innovante qui ne s’applique pas seulement aux salariés, mais aussi aux indépendants et aux parasubordonnés. L’objectif est d’éviter l’exploitation des travailleurs. Pour Giuseppe Conte, président du M5S, le gouvernement, qui a déjà démantelé le revenu de citoyenneté et les relations de travail précaires, ne se rend pas compte de l’augmentation du malaise social. Selon le centre-gauche, le salaire minimum profiterait surtout aux femmes : 23,3% des travailleuses verraient leur salaire augmenter selon une étude de l’Inapp. Pour Carlo Calenda, il s’agit d’une « réglementation de bon sens ».
Qui considère le salaire minimum comme une mesure inutile ?
La majorité a serré les rangs, fermant la porte au dialogue. Dans une interview accordée au Corriere della Sera, le Premier ministre Giorgia Meloni reprend la position déjà exprimée par la ministre du Travail Elvira Calderone : « Je ne suis pas convaincue que le salaire minimum puisse être fixé par la loi ». L’approche du gouvernement, a ajouté M. Meloni, « va dans le sens d’encourager des négociations collectives de plus en plus vertueuses, d’investir dans la protection sociale des entreprises, d’agir sur les avantages fiscaux et les cotisations, et de stimuler le renouvellement des contrats ». Le ministre des affaires étrangères, Antonio Tajani, a évoqué le salaire minimum collectif : « À Fi, nous nous référons au texte de l’UE : le salaire minimum doit être appliqué par la loi lorsqu’il n’y a pas de négociation collective avec des pourcentages supérieurs à 8 %. Ce n’est pas le cas en Italie, nous pouvons décider qu’il doit y avoir un salaire minimum collectif, à utiliser pour tous les travailleurs qui n’ont pas de convention collective ».
La position des syndicats
Les syndicats sont divisés sur l’utilité de l’introduction du salaire minimum. La Cisl est historiquement contre. « Nous pensons qu’il faut introduire le salaire minimum dans ce pays, mais avec des contrats, pas avec la loi, parce que nous risquons de créer des alibis et des prétextes pour les entreprises qui, à ce moment-là, pourraient décider de ne pas appliquer les contrats et de déterminer une spirale descendante dans la dynamique des salaires », a expliqué le secrétaire général de la Cisl, Luigi Sbarra. Pour le secrétaire général de la CGIL, Maurizio Landini, le salaire minimum est un outil indispensable. Tous les travailleurs, du subordonné à l’indépendant avec un numéro de TVA, doivent avoir les mêmes droits et protections. Des millions de personnes ont un salaire horaire inférieur à neuf euros et cela n’est plus acceptable. Il y a également eu une augmentation des contrats dits « pirates ». Je pense donc que ces deux questions doivent être abordées ensemble », a-t-il déclaré. Pierpaolo Bombardieri, secrétaire général de l’Uil, souligne que le salaire minimum est nécessaire. « Nous avons le sentiment que la politique est éloignée de la réalité et qu’elle ne représente pas les jeunes qui, aujourd’hui, gagnent très peu et vivent dans une situation précaire. Nous les représentons ».
Les autres positions dans le domaine
Le débat est ouvert à 360 degrés même si pour beaucoup il s’agit d’une question idéologique. La Confindustria donne le feu vert au dialogue : « Si nous voulons parler d’un salaire minimum avec un seuil de 9 euros, ce n’est pas un problème pour la Confindustria. Nos contrats sont tous supérieurs. Il n’y a pas de veto, au contraire, c’est un grand défi et nous entrons dans toute la gamme des sujets », a déclaré le président Carlo Bonomi. Selon Pasquale Tridico, ancien président de l’Inps, l’introduction du salaire minimum aurait notamment pour effet d’augmenter l’offre de main-d’œuvre, les entreprises ayant moins de difficultés à trouver des employés dans les secteurs de la restauration, du tourisme et des loisirs, d’accroître l’emploi des femmes et d’augmenter le taux de natalité. Il en résulterait une réduction de l’inégalité mesurée par l’indice de Gini de 1,5 % et une diminution de la pauvreté relative de 2 %. L’impact sur les recettes de l’État se traduirait par une augmentation des recettes de 1,5 milliard entre l’augmentation de l’IRPEF perçu et la diminution des dépenses pour les subventions. De l’Acli émane une considération annexe qui renverse le problème : il conviendrait de plafonner également les salaires maximaux. « Outre le salaire minimum, des seuils de revenus maximums autorisés devraient également être identifiés afin de limiter les rémunérations exagérées, ainsi que les rentes et les superprofits, des managers et des spéculateurs », a souligné Stefano Tassinari, vice-président de l’Acli.