L’augmentation des taux d’intérêt par la Banque centrale européenne risque de se répercuter fortement sur la consommation et les investissements, ralentissant la reprise économique. En effet, si la BCE semble vouloir augmenter encore de 25 points de base le loyer de l’argent, pour contrer une inflation qui a tendance à ralentir très lentement, plusieurs secteurs annoncent des conséquences importantes tant pour les entreprises qui ont besoin de financement pour leurs investissements que pour les ménages, notamment dans le cas d’un marché immobilier qui annonce des baisses de ventes et de l’ensemble du secteur. La tendance est européenne, révélée par exemple en Allemagne par différents indices, et en Italie toujours signalée par le Centro Studi Confindustria dans son bulletin flash Congiuntura de juin, selon lequel, en outre, face à la hausse des taux qui freine la consommation et les investissements, l’inflation continue à baisser lentement : « la croissance est plus fragile ».
En effet, l’inflation italienne a repris sa tendance à la baisse en mai (+7,6% par an, contre +8,2%), grâce à la chute du prix du gaz (30 euros par mégawattheure) qui ralentit progressivement les prix de l’énergie à la consommation (+11,5% par an). Les prix de l’alimentation augmentent tout autant (+11,4 %), mais ralentiront dans les prochains mois car les matières premières, très chères, n’augmentent plus. Les prix des biens et services de base commencent à se stabiliser (+4,8 %, après +4,9 %), après des mois de hausse. Cependant, le taux payé pour les prêts par les entreprises italiennes a de nouveau augmenté en avril (4,52 %). Les conditions de plus en plus onéreuses freinent le crédit bancaire qui diminue fortement (-1,9% par an en avril). La raison en est la poursuite de la hausse du taux de la BCE, dans une clé anti-inflationniste, à 4,00 % en juin, anticipant une nouvelle hausse en juillet.
Selon le bulletin, la faiblesse concerne l’ensemble de la zone euro, tandis qu’aux Etats-Unis, il y a un net coup d’arrêt pour l’industrie (production à -0,2%). Dans la zone euro, les anticipations des entreprises industrielles se sont dégradées en avril et mai, révélant un ralentissement des perspectives de demande ; en mai, celles du secteur des services ont également baissé ; la confiance des ménages est restée stable, mais toujours bien en dessous des niveaux d’avant la pandémie. En Italie, la production de la construction a fortement chuté en avril (-3,8%), après +1,0% au 1er trimestre. L’industrie a perdu du terrain : la baisse de la production s’est accentuée en avril (-1,9%), quatrième contraction mensuelle consécutive ; l’industrie manufacturière a été la plus touchée (-2,1%), alors qu’elle avait bien résisté jusqu’à présent. En mai, les signaux sont mitigés : l’indice PMI manufacturier s’est encore enfoncé dans la zone de contraction (45,9 contre 46,8) et la confiance des entreprises a de nouveau chuté. Les investissements sont faibles : « Les enquêtes de la Banque d’Italie pour le premier trimestre – c’est l’analyse de Confindustria – montrent une aggravation. Les attentes des entreprises en matière de dépenses d’investissement pour les six prochains mois ont chuté (14,9 contre 20,0) ; les entreprises demandent moins de crédit pour financer les investissements ». En outre, « les exportations italiennes de biens ont diminué en mars et en avril (-2,3 % et -1,7 %, en valeur), tant sur les marchés de l’UE que sur les marchés hors UE ; les biens intermédiaires ont été les plus touchés. Sur une base annuelle, la dynamique des ventes de biens à l’étranger a été très réduite (+1,1% en avril), pénalisant l’industrie, alors qu’elle a été robuste pour les services (+17,3%), soutenue par le tourisme. En effet, le tourisme en Italie a enregistré en avril +30,7% par rapport à 2022, en termes de dépenses des voyageurs étrangers, et se situe désormais nettement au-dessus des niveaux de 2019.
En Allemagne, l’indice Ifo de confiance des entreprises a baissé en juin au-dessus des estimations à 88,4 points contre 91,5 points en mai. Une baisse à 90,7 points était en fait attendue pour le mois qui s’achève. Les attentes des chefs d’entreprise sont également tombées en dessous des estimations, passant de 88,3 à 86,3 points contre 88 attendus, et l’évaluation de la situation en Allemagne, passant de 94,8 à 93,7 points, au-dessus des 93,5 points attendus. La dernière enquête flash Pmi du Hcob montre également que l’économie allemande a perdu considérablement de son dynamisme à la fin du deuxième trimestre, la détérioration des conditions de la demande entraînant un ralentissement de la croissance des entreprises. La production manufacturière a également chuté, passant de 43,2 points en mai à 41 points. L’indice composite est tombé à 50,8 en juin, contre 53,9 le mois précédent et bien en deçà des attentes du marché (53,5).
Toujours selon l’analyse de S&P Global, « les taux d’intérêt plus élevés freinent la demande » dans la zone euro, ce qui affecte la croissance, bien que, « même dans un cycle économique ralenti », les analystes « ne voient pas la zone euro tomber dans une profonde récession ». En particulier, toujours selon S&P Global, « les perspectives à moyen terme (2025-26) sont plus favorables que les perspectives à court terme (2023-24) », précisément parce que, d’ici quelques années, les politiques monétaires restrictives devraient avoir été supprimées.