ven. Déc 27th, 2024

Il y a presque quatre-vingt-dix ans, Manuel Chaves Nogales a recueilli, dans son livre « Andalucía la Roja y la Blanca Paloma », plusieurs notes et rapports anthropologiques et sociaux de l’époque. pèlerinage d’El Rocío. Dans l’un des chapitres du livre, exceptionnel au demeurant, et en compagnie d’un voyageur français dont il a été le cicérone, l’auteur décrit d’une manière particulière le départ de la Hermandad del Rocío de Triana. « Le simpecado de la confrérie, coûteux et orné – il est utilisé pour la première fois cette année – est solennellement sorti de sa chapelle et placé sur le superbe chariot d’argent, fierté des pèlerins… »

Le texte se poursuit : « Derrière eux marchent les charrettes privées, qui sont la véritable maison des pèlerins pendant ces sept jours. Ces chariots blancs, sur les toiles transparentes desquels le soleil andalou explose en hochant solennellement la tête le long des routes, sont d’une beauté irréprochable et d’un succès infini… ». Et au fur et à mesure de la lecture, le cortège nous apparaît soudain tel qu’il était autrefois, tel qu’il est aujourd’hui. « Et ainsi, lentement, lentement, au milieu des guitares, des chants, des applaudissements, des cris, vivas, « vivas », « desplantes », vin et castagnettes, il avance à travers l’Altozano et la Chapina jusqu’à ce qu’il sorte dans la campagne… ».



Les cheveux hérissés, ceux d’entre nous qui ont accompagné Triana hier savaient qu’ils étaient les héritiers d’une manifestation qui transcende les clichés et les poncifs, les grossièretés et les idées fausses : est toute une terre en soi qui s’exprime, pour soi et pour les autres, avec des siècles oscillant sous le joug, avec de brefs bonheurs satisfaits qui se résolvent en fleurs jaunâtres dans les avant-toits d’argent. Il semble que le temps se déplace avec une lourde lenteur sur les heures solaires. Nous sommes retournés, instantanément, dans une autre ville, dans un autre espace passé chargé d’une lumière propre, humainement chaude, simple et certaine.

Hier Triana est allée au Rocío, et a fait ses adieux de la meilleure façon qui soit : en chantant.

By Nermond

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