Le squelette d’une industrie qui n’a jamais été exploitée peut-il être transformé en un poumon vert, capable de contribuer aux besoins énergétiques du pays ? C’est la proposition qui, en ces heures, mûrit à Reggio Calabria, précisément à Saline, un hameau côtier de la commune de Montebello Jonico. C’est ici qu’a été achevée en 1974 l’usine Liquichimica Biosintesi, une entreprise qui devait produire des bioprotéines, c’est-à-dire des protéines produites à partir de dérivés du pétrole et destinées à l’alimentation animale. L’usine est financée par le fameux « paquet Colombo » : en 1971, le gouvernement alloue 1 300 milliards de lires pour soutenir certains investissements industriels en Calabre. Ces mesures ont permis d’apaiser la révolte de Reggio, née de l’attribution de la capitale à Catanzaro. Mais l’usine ne fonctionne que deux mois. L’Institut supérieur de la santé interdit les bioprotéines parce qu’elles sont cancérigènes et la Liquichimica est définitivement fermée : les travailleurs sont licenciés pendant 23 ans. La propriété de la zone industrielle a connu diverses vicissitudes au fil des ans, la dernière étant l’acquisition par la multinationale Repower en 2006. La gestion de l’usine a été confiée à la filiale italienne du géant suisse, la société Sei, dont 20 % des actions sont détenues par le groupe Hera. Repower avait l’intention de construire une centrale à charbon, mais grâce à la mobilisation de la population et à un blitz médiatique de Greenpeace, le projet a finalement été abandonné en 2016.
La région de Liquichimica est un lieu enchanteur. Il suffit de penser qu’à l’intérieur du périmètre industriel se trouvent également une oasis naturelle et un port… actuellement ensablé. Mais cette zone, où l’on cultivait autrefois la bergamote et le jasmin, a tout le potentiel nécessaire pour entamer une renaissance industrielle. La proposition, très discutée ces jours-ci, consiste à reconvertir l’installation en une usine de production d’hydrogène vert, en profitant également des opportunités offertes par le PNR.
Mariachiara Benedetto, ingénieur commercial chez Ohmium International, leader du marché des usines de production d’hydrogène vert avec la technologie électrochimique Pem (Proton Exchange Membrane), s’est également exprimée sur la faisabilité. L’opportunité d’installer une installation de production d’hydrogène vert dans la zone de Saline Liquichimica est absolument réalisable », a déclaré Benedetto à Avvenire. Il est évident que l’installation de production d’hydrogène doit être accompagnée d’une installation de production d’électricité à partir d’une source renouvelable et, dans le cas de Saline, il serait souhaitable d’installer des panneaux solaires. En fonction de la production d’énergie des panneaux, il faudrait ensuite dimensionner l’installation électrochimique de production d’hydrogène ». Le Dr Benedetto, qui connaît bien la réalité de Saline, a également réfléchi à la manière de résoudre l’un des problèmes de longue date de la ville : le manque d’eau. Il faudra penser à alimenter l’usine de production d’hydrogène avec de l’eau dessalée », a suggéré l’expert, « c’est-à-dire de l’eau prélevée dans la mer et traitée dans une installation d’osmose inverse, ce qui permet d’obtenir le degré de salinité nécessaire pour alimenter l’usine de production d’hydrogène électrochimique ».
La question des coûts reste cependant posée. Un premier appel d’offres du Pnrr pour la construction d’installations de production d’hydrogène vert a été attribué il y a quelques jours : en Calabre, deux projets ont été financés pour un montant de 21,6 millions d’euros. En revanche, l’appel d’offres de Ferrovie della Calabria pour la fourniture de huit trains à hydrogène (pour un montant de 100 millions d’euros) n’a pas été retenu : un financement qui, au lieu d’être perdu, pourrait être réorienté vers la production d’énergie verte, précisément en refinançant la construction de centrales à hydrogène vert. Ainsi, en plus d’un impact environnemental favorable, le PNR garantirait à la Saline Joniche une juste rédemption sociale.