Je me souviens encore de cette visite, presque improvisée, dans l’atelier de Dani Franca, loin de toute intrusion urbaine et loin de tout, en général. Invitée par notre ami Antonio Bermudo, qui a décrit la vie, l’œuvre et la personnalité de son compatriote préféré Antonio Eslava Rubio, Franca nous a reçus avec cette sincérité sans prétention que recèle son sourire. Dans un des coins de son atelier, et toujours sur fond de jazz et de blues, sa dernière œuvre, terminée et prête à être présentée, était penchée sur le chevalet. C’était l’affiche du 75e anniversaire du Señor del Descendimiento, de la Hermandad de la Quinta Angustia de Carmona.
Je me souviens encore de l’impression qu’il nous a faite. Une sorte de Gernika cofradiero vertical, plein d’ombres et de blancs, de lumière et d’ombres, de lambeaux incomplets sortant de l’encre elle-même. Visages goyaesques sur un terrain déformé, le corps est descendu sans traits ni certitudes. Comme si une photographie préhistorique avait été jetée sur un parchemin grisâtre. Un poster sur lequel étaient imprimées toutes les cultures qui faisaient de Carmona plus qu’une simple star.
Jeudi dernier, lorsque nous avons découvert l’affiche de Cadix, cette toile indéfinissable m’est revenue. Le Christ de la bonne mort s’insérait, sans ajouts, dans le concept de Dani. Ses traits, les mèches inachevées et sauvages, les yeux fermés attendant on ne sait quoi ? Et comme l’a écrit un bon ami sur les réseaux sociaux : « De la verticalité pour une affiche qui montre une vision horizontale ». En effet, l’image nous interroge directement. Les masques de carnaval, ornements de cultes sur un mur écaillé, font le reste. À l’exception du graphisme correspondant à une supposée transcription du discours andalou, qui est l’ingrédient qui a suscité le plus de débats, l’affiche remplit son rôle d’appel et d’annonce.
Le 25 février, le même auteur présentera son affiche de la Semaine Sainte, cette fois pour notre ville. Après les succès de Chema Rodríguez et de Manolo Cuervo (conformément à la décision courageuse du Conseil des Confréries), les cofrades habituent peu à peu leur regard et leur critique à une peinture différente, internationalement reconnue et plus que conforme au principal festival de Séville et à ses interprétations multiformes. Lorsqu’elle circulera, rapidement et de manière incontestable, sur les réseaux sociaux, nous nous débarrasserons de nos préjugés et comprendrons que la Semaine sainte à Séville peut – et doit – être représentée d’une infinité de façons. C’est cette racine qui la maintient vivante et indestructible en tant qu’entité absolue et inégalée.