Vous avez encouragé la manœuvre du gouvernement. Vous êtes sûr de ne pas avoir été trop optimiste ?
Notre satisfaction, a répondu Ettore Prandini, président de la Coldiretti, vient du fait que, malgré la réduction des ressources, les dotations à l’agriculture et à l’agroalimentaire ont « tenu », mais nous sommes conscients qu’il faut encore y travailler : Giorgetti nous a dit le 21 décembre à notre Assemblée que de nouveaux instruments pourraient être mis en place si la crise persistait. En tout cas, nous sommes prêts à miser notre avenir sur le marché et non sur la dette du pays.
Expliquez-nous comment ces deux milliards vont pouvoir redresser le sort de l’agriculture.
La manœuvre offre une continuité aux mesures que nous avons réalisées au cours des dix dernières années, en termes de fiscalité et de renouvellement des générations, d’innovation et de souveraineté alimentaire. Mais il y a aussi des poussées vers l’avant, comme l’aide aux démunis : dans un pays où les pauvres ont de plus en plus de 15 ans, garantir une alimentation de qualité est un acte de justice sociale mais aussi de clairvoyance. Ceux qui sont nourris aujourd’hui ne pèseront pas sur le système de santé national demain. Ajoutons que l’agriculture italienne est en train de démontrer qu’elle sait bien dépenser les fonds du PNR, et c’est pour cette raison que nous avons demandé de doubler la dotation de 5 à 10 milliards : si nous rendons toute la production traçable, nous pouvons nous distinguer sur le marché mondial sans oublier qu’avec des contrats de filière, il est possible de réduire la dépendance vis-à-vis de l’étranger et de garantir des prix équitables pour les producteurs et les consommateurs.
L’agrophotovoltaïque va-t-il décoller ?
Nous le pensons. L’agriculture peut contribuer à la lutte contre la crise énergétique sans consommer les terres fertiles nécessaires pour renforcer l’objectif de souveraineté alimentaire. Dans la première tranche des fonds du PNR, nous avons dépassé l’allocation de 40 %. Malheureusement, cette mesure n’a été conçue que pour la consommation des exploitations agricoles : les entreprises disposent de surfaces plus importantes et nous devrions également les utiliser pour mettre en réseau les énergies renouvelables dont le pays a besoin.
Coldiretti a mené une bataille contre les produits de type mafieux sur le marché international. Où en est la bataille « historique » contre l’agro-piraterie ?
Cette bataille est un acte de justice envers le Sud et son immense beauté. Nous avons demandé à l’Europe d’interdire les noms de locaux et de produits « mafieux » qui circulent largement dans des pays comme l’Espagne. Malheureusement, les accords internationaux sont négligents et c’est encore le cas aujourd’hui pour la sonorisation italienne qui cube 120 milliards de produits faussement italiens, dont 20 sont commercialisés aux USA.
À partir de 2024, la réforme de la PAC entrera en vigueur. Qu’en pensez-vous ?
Absolument négatif. Pendant trop longtemps, nous avons été habitués à penser au « type » de PAC et non au budget. La réduction du budget agricole européen a été une erreur retentissante. Or, cette réduction, ajoutée à l’inflation, signifie une diminution de 30% des ressources qui parviendront aux entreprises, entre autres avec un alignement forcé qui ne tient pas compte des différents coûts des différents secteurs agricoles.
Nous parlons toujours des fonds européens : pourquoi Bruxelles est-elle si convaincue que le vin est mauvais pour vous et que la viande synthétique est bonne pour vous ?
Parce qu’elle est exploitée par les multinationales qui ont besoin de vendre des produits alternatifs. Il n’y a aucune raison médico-scientifique de diaboliser le vin et la viande ; au contraire, la consommation responsable de nombreux aliments doit être encouragée. La tentative d’interdire le financement de la communication de ces produits vise à ouvrir l’espace du marché aux aliments synthétiques, voire surtransformés, sur la salubrité desquels un débat sérieux devrait être ouvert. Pour 2023, nous avons écarté le danger, mais nous devons empêcher le déclenchement de l’interdiction en 2024.
De nombreux Italiens fêtaient Noël à la maison. Quelle est l’importance du marché intérieur pour les agriculteurs italiens ?
Très peu, même si les exportations agroalimentaires atteindront une valeur record de 60 milliards cette année. L’avenir d’un système qui emploie 4 millions de personnes dépend de la reprise de la consommation domestique, ménagère et horeca. En outre, le secteur de la restauration est l’ambassadeur du Made in Italy à l’intérieur et à l’extérieur des frontières nationales.Vous avez créé une marque – signée par des agriculteurs italiens – qui se vend dans la grande distribution.
Même si nous vivons une époque où le commerce est moins important, ne pensez-vous pas que l’Italie manque d’une chaîne de distribution mondiale ?
C’était une grosse erreur de ne pas favoriser au niveau national la croissance d’une entité similaire à Carrefour. Mais entre l’Italie et la France, il y a deux approches radicalement différentes, comme le montre le fait qu’il est beaucoup plus facile pour un investisseur étranger d’acheter des entreprises agroalimentaires italiennes que pour les Italiens d’acheter des entreprises françaises : Paris est beaucoup plus défensif sur son agroalimentaire que Rome.